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24/05/2013

Une intelligence collective technologiquement augmentée : « la mort » d’Excel ? Une nécessaire réflexion sur les outils de gestion

data.jpgLe cadrage du séminaire 7 de l’Executive Master « Trajectoire Manager Sport (TMS) » « Du contrôle de gestion à l'intelligence stratégique en gestion » et l'étude à propos de « La face cachée des outils de gestion et le pouvoir structurants des outils » m’ont permis d’avancer - dans mon intervention - quelques réflexions sous la forme d’un document « Prezi » disponible à cette adresse : http://prezi.com/vje3upnaxdk6/tms-23-mai-aix/?kw=view-vje3upnaxdk6&rc=ref-4707909

Nous souhaitons d’emblée mettre l’accent sur la dimension ingénierique en avançant « ... l'inefficacité des théories aussi longtemps qu'elles ne sont pas accompagnées des instruments et des compétences qui leur donne un sens et un intérêt, ... ce ne sont pas les théories mais les dispositifs dont sont issues ces théories qui changent le monde, ... » (Michel Callon, 1999) et que si « A l'absence de vision, on a substitué un entêtement obsessionnel de l'efficacité des moyens ; … la stratégie ne se résume pas à l'organisation efficace de moyens pour atteindre un but » (P. Baumard, 2012). Le développement contemporain des sciences et pratiques d’ingénierie des systèmes complexes appelle cette réflexion. L’intervention s’est organisée autour de cinq grands thèmes qui sont autant de pistes à approfondir en suivant les liens hypertextes qui sont proposés.

1. Des outils de gestion on fait d'abord et avant tout l'expérience de la manifestation. Cette partie retrace le dispositif méthodologique de l’étude citée en référence et vise à qualifier « de quoi on fait l’expérience ». En termes de méthodes, il s’agit avant tout, d’éviter le caractère catégorisant à priori et veiller à ce que les dispositifs d’étude ne se transforment en grilles d'analyse préconstruites qui occultent la réalité à laquelle ils prétendent donner accès

S’éloignant - en conscience - d’une conception fantasmée de l’objectivité des sciences dures appréhendant les pratiques sociales, nos procédures s’inspirent d’une philosophie pragmatique et phénoménologique pour « faire avec » des process multi-niveaux, multi-échelles. La diversification des procédés de documentation de l'activité et la variation d’échelles permettent de construire des objets complexes et, de prendre en compte « la structure feuilletée du social ».

2. Cette partie veut discuter une dichotomie répandue qui perçoit dans la « gestion » le caractère instrumenté et quantifié de la conduite de l’action collective et dans le « management » les aspects, plus qualitatifs, de direction et  d’animation des équipes. L'esprit gestionnaire « evidence based policy » appuyé sur la sacralisation des chiffres laisse à penser qu’à travers un jeu d'indicateurs « simples » on pourrait disposer d’un outil de pilotage stratégique par les nombres.

Ouvrir la boîte noire de la construction des instruments de quantification, c’est mettre en évidence les objectifs d’action qui ont présidé aux choix effectués pour définir les critères retenus pour construire ces outils et les méthodes mises en œuvre.  Ils sont révélateurs des formes et des objectifs de l’action publique, et de la conception du bien commun qui leur est sous-jacente. La lecture de l’ouvrage « Désacraliser le chiffre dans l'évaluation du secteur public » d’Albert Ogien (2013) est d’une grande utilité

3. Un impensé des sciences de gestion : les outils - outre leurs qualités intrinsèques - structurent aussi l'action collective ! « … comptabilité analytique, tableau de bord, target costing, se muent en acteurs capables de vouloir, décider, imposer, chercher, trouver, choisir, animer à eux seuls la scène de l’entreprise, dans une sorte de théâtre animiste dont les personnages sont des instruments de calcul, des systèmes d’imputation et des tableaux d’indicateurs » (Lorino 2002 texte ci-contre). Les outils de gestion - entre autres outils - ne sont pas neutres : ils sont porteurs d'une théorisation du « réel ». Mais de quel réel ? Voila bien la question qui est adressée au manager créateur de son « monde propre » (cf. séminaire 2).

Si l'on admet que la coordination des actions humaines est problématique et ne résulte pas de lois de la nature (physique et sciences expérimentales standard), on peut comprendre que la rationalité humaine est d'abord interprétative et non pas seulement ou d'emblée calculatrice. (Girin, 1990). Et ceci, nous amène à discuter de l'idée de rationalité en sciences de gestion et des organisations. (H. Simon 1992 http://pfleurance.hautetfort.com/list/seminaire-4-manager-dans-la-contingence/1596441729.pdf)

4. Le passage du national (la CO) au local (le PES) : la question de l'intégration multi-échelles et les « big data » traverse l'ensemble des process. Un retour sur nos moyens de représentation et de compréhension : mettre en récit, raconter l’histoire de ses données, s’appuyer les  langages graphiques émergents, utiliser des techniques de visualisation pour augmenter la cognition, exploiter des saillances visuelles « artefactuelles » pour mettre en valeur/trouver des prises d'intelligibilité des données, améliorer la visualisation graphique pour permettre une « conversation réflexive » avec les données, …

Un certain nombre d’instruments informatiques sont aujourd’hui mature pour une utilisation quotidienne (Gephi, NodeXL, Wordle, Wordtree, navicrawler, Tableau, Netlogo, …) et apporter une aide à la gouvernance des organisations dans des environnements complexes et incertains où la maîtrise/suivi de l’information joue un rôle important

5. Dép(l)acer les bornes de l'écosystème pour assurer une gouvernance partagée : la fin d'un cycle managérial ? En nous appuyant sur un questionnement vis-à-vis de la notion de valeur, nous amenons à discuter de la seule pertinence - dans le domaine du sport - des théories classiques en économie qui rapportent la valeur des biens à la quantité de travail nécessaire à leur production et/ou à l’idée que c'est l’utilité des biens qui fonde leur valeur. Certes, ceci concerne les biens d'un certain type, c'est-à-dire ceux qui sont échangeables ou dont la valeur est quantifiable en termes d'argent. Le phénomène économique sera donc « combien de biens sont produits », « comment change la valeur des biens », « combien de biens sont échangés », « combien l'échange de biens augmente leur valeur et la richesse », etc. Est-ce que le manager sportif peut avoir cette seule option en tête ?

Fondamentalement, la question de la valeur pose celle de la manière dont on va internaliser les externalités qui sont très nombreuses dans le domaine du sport. De même nous apparait pertinente, l’économie des singularités qui rend compte de toutes les transactions portant sur des biens multidimensionnels et de qualité incertaine dont leur échange marchand est caractérisé par une incertitude radicale : (1) une incertitude stratégique qui renvoie au risque d’inadéquation entre une singularité et son client potentiel compte tenu du caractère multidimensionnel des biens singuliers ; (2) une incertitude sur la qualité, car au moment de la transaction, les singularités ne sont que des promesses, l’évaluation de leur qualité est différée en contexte (avocat, spectacle, …).  L’ouvrage « Manifeste pour une comptabilité universelle » (2013) d’un collectif d’experts comptables (...) ouvre la voie à la prise en compte des dimensions sociale, environnementale et de gouvernance qui viendraient compléter la comptabilité économique classique. 

13:43 Écrit par Philippe Fleurance | Lien permanent | Commentaires (0) | |

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